Clara Arnaud : Et vous passerez comme des vents fous

La vieille jument avait décidé de mourir ici, après s’être enivrée des fleurs et des horizons de l’estive, comme si elle avait choisi son lieu et son moment. Il songea à Jean, qui serait aussi heureux que triste, de la savoir partie ainsi. Il lui dirait qu’il l’avait trouvée déjà entamée par les rapaces, reposant au milieu d’un tapis mauve de crocus éclos dans les derniers rayons de l’été. Il rentra à la cabane en pleurant, laissant les vautours, auxquels succéderaient les gypaètes, faire disparaître l’enveloppe charnelle de la jument. Il se plut à penser que son esprit allait désormais résider en ces lieux, dans l’herbe qui s’agitait sous la brise d’été, les rochers, les nuages, disséminés un peu partout, veillant l’estive. Cette mort-là était gracieuse, il en parlerait à ses filles, elles verseraient une larme mais elles comprendraient.

Cela se sent tout de suite : Clara Arnaud a passé des journées entières dans la montagne pour nous livrer ce joli roman qu’est Et vous passerez comme des vents fous, dans lequel elle croise savamment deux destinées : celles de Gaspard, un berger taciturne amoureux de ses bêtes, et d’Alma, une éthologue spécialiste des ours.

Je viens de la campagne, j’y suis très attachée, et le roman se déroule en Ariège, dans ma région natale. Par conséquent, j’avais une envie folle de trouver Et vous passerez comme des vents fous passionnant, je rêvais de m’enivrer des odeurs et de la vision de ces paysages pyrénéens magiques, je voulais désespérément y être sensible. Mais malgré le scénario novateur, le tout reste un peu trop contenu, un peu trop scolaire voire répétitif. D’abord, les personnages semblaient contraints à rentrer dans des boîtes bien trop petites pour l’immensité dans laquelle ils évoluent, et m’ont semblé tour à tour agaçants et clichés. Quant à la trame, je l’ai trouvé trop superficielle malgré le très bon traitement de la question plutôt contemporaine de la réintroduction de l’ours dans nos montagnes. J’ai finalement refermé le livre sur un goût de bâclé.

En revanche, je m’incline devant la plume organique et subtile de Clara Arnaud. Elle réussit à mobiliser les cinq sens à travers son exploration de la montagne. On sent bien qu’elle la connaît et qu’elle l’aime, son odeur, sa lumière, et surtout son vertige. Je me sentais transportée dans des paysages verdoyants, alors que je lisais dans le gris du février parisien. Je sentais l’odeur musquée de la fourrure de l’ours que masque à peine l’ambre des pins. Tout mon corps était comme à bord de falaise, bercé par le bruissement à la fois tonitruant et silencieux de la montagne.

La montagne éprouvait, elle faisait le tri entre ceux qui ne faisaient qu’y passer et ceux qu’elle accueillait, dont tout l’être, le corps se pliaient à ses caprices.

Malheureusement, la plénitude de ce biotope qu’elle affectionne tant a été contrebalancé par ma recherche incessante du Message. Est-ce un roman qui supporte ou qui critique la réintroduction de l’ours ? Clara Arnaud cherche-t-elle seulement à soulever la question sans y répondre ? Pourquoi avoir introduit Jules, jeune montreur d’ours du début du XXème siècle à la destinée tragique mais qui n’a aucun lien avec l’intrigue principale ? Peut-être n’y a-t-il pas de sens caché, peut-être suis-je trop cérébrale. Je dois toutefois applaudir la volonté de l’autrice de rendre visible au fil des pages la manière dont le changement climatique transforme les paysages et le travail du berger. Je suis très sensible à cette question-là et je l’ai trouvée plutôt bien amenée.

Je n’ai donc pas apprécié ce roman à sa juste valeur, ce qui est dommage, puisque je sais intimement qu’en un autre temps et un autre lieu il aurait pu me passionner. Peut-être que d’autres, moins attachés que moi à l’intrigue et aux personnages d’un roman, seront plus touchés par le talent littéraire de Clara Arnaud. Je me réserve l’idée de lire son autre roman, La Verticale du fleuve, paru en 2021 chez Actes Sud.

Et vous passerez comme des vents fous, Clara Arnaud. Editions Actes Sud, 2023.

Pauline Delabroy-Allard : Ca raconte Sarah

Ca raconte Sarah, sa beauté inédite, son nez abrupt d’oiseau rare, ses yeux d’une couleur inouïe, rocailleuse, verte, mais non, pas verte, ses yeux absinthe, malachite, vert-gris rabattu, ses yeux de serpent aux paupières tombantes. Ca raconte le printemps où elle est entrée dans ma vie comme on entre en scène, pleine d’allant, conquérante. Victorieuse.

Contrairement à beaucoup de lecteurices, je ne lis pas pour m’évader du monde réel. Je lis pour ressentir des émotions fortes, pour plonger au plus profond de l’humain, ressortir chamboulée. Il est rare que l’on trouve de ces romans capables de tout changer, de poser un filtre sombre ou pétillant sur nos yeux, de nous mettre le coeur au bord des lèvres, et de retourner notre estomac sans prévenir. Ca raconte Sarah est de ceux-là.

Le synopsis est simple : la narratrice rencontre Sarah, un soir de nouvel an. Elles tombent en amour de manière grandiose. Dans une seconde partie, survient l’absence, et tout ce qu’elle inspire. Le vide. L’oubli. La mort.

Pour être tout à fait honnête, c’est un livre que l’on aime ou que l’on n’aime pas. Soit, comme moi, on réussit à faire corps avec la plume de Pauline Delabroy-Allard, aussi tempétueuse que douce et enlevée, soit on n’y entre pas. C’est comme ça. Autant ne pas forcer. J’ai donc eu cette possibilité de pénétrer pleinement dans l’écriture, de faire corps avec, du début à la fin (moyennant quelques longueurs). Elle est au service du récit : dans la première partie, symbolisant la passion vorace liant la narratrice, qui n’a au demeurant pas de nom, et Sarah, les phrases sont hachées dans de minuscules chapitres, parfois de quelques lignes à peine. Toute la frénésie destructrice de la relation est là, cachée, l’obsession aussi, la recherche de l’absolution. Et puis, tout se calme, devient alangui, doux. On plonge plus profond dans la psychologie de cet étrange « je ». On a le temps. On souffle. Mais elle, elle ne respire plus : c’est ce dangereux contraste qui sous-tend toute la fin du roman et qui finit par briser le cœur du ou de la lecteurice.

Alors, c’est comme ça ? La vie peut s’arrêter, l’amour peut mourir, et ce monde peut continuer, juste à côté, dans le même temps, dans le même espace, à étinceler de beauté ?

Je l’affirme, le répète haut et fort : ce livre m’a brisé le cœur. Tant de choses en émanent : une joie féroce, un désespoir qui l’est tout autant, l’amour dans sa forme la plus pure, et le désamour. Mais surtout, voici la vraie enveloppe charnelle du livre : la beauté. La beauté est partout, dans la relation éclatante d’abord, dans les rues de Trieste, cette ville au bord de la mer adriatique, ensuite. Elle est partout, mais se déplace brutalement de l’intérieur vers l’extérieur, car sans relation, dans l’absence, elle n’a plus de sens : à quoi bon la beauté si l’être aimé n’est plus là ? Dans la lente déliquescence de la narratrice, sa lutte pour se maintenir à la surface malgré l’abyme qui l’appelle, il n’y a plus de beauté ; elle s’est déportée sur la ville, sur la mer, sur le monde extérieur. Dedans, il n’y a plus que de la noirceur, que l’on comprend à demi mot, entre les lignes.

La force du roman est son originalité. Il faut souligner, je pense que c’est assez remarquable, qu’il s’agit du premier roman de l’autrice. Tout a une dimension implicite et passe au travers de cette écriture saccadée et fuyante. On ne sait rien du quotidien, ou alors très peu, on ne sait que le torrent de passion qui parcourt la narratrice. C’est probablement pour cela que certains avis que j’ai pu recueillir sont mitigés. Il ne se passe pas grand chose, et on peut avoir du mal à s’identifier aux héroïnes, il faut réussir à pénétrer la dimension purement littéraire du livre.

Je vous conseille de lire Ca raconte Sarah si :

  • Vous avez le coeur bien accroché et n’avez pas peur de vous prendre une belle gifle
  • Vous êtes sensible aux mots, aux phrases, à l’écriture
  • Vous souhaitez lire une histoire d’amour magnifique et déchirante (je pèse mes mots)

Ca raconte Sarah, Pauline Delabroy-Allard. Editions de Minuit, 2018.

Pierre-François Kettler : Le monde de Belmilor, tome 2 – Originalité

Eschylle est un chat très particulier : son esprit communique avec celui de Bélerin, un Elfe noir apprenti magicien, et il voit à travers ses yeux.

Alors qu’il visite les bas-fonds de Bourg-de-Brank, Eschylle rencontre le Déchu, un très vieux matou qui lui révèle d’étranges secrets…

Ces secrets ont-ils un lien avec les assassinats de fanatiques de l’Empire Brun, et avec les enlèvements de femmes ? À quel jeu trouble joue l’Empire Démagocratique, situé de l’autre côté de l’océan de l’Atalante qui tique ?

Face aux menaces qui pèsent sur le Haut-Royaume de Lear, Eschylle et ses compagnons parviendront-ils à préserver leur originalité et à affirmer leur singularité ?

Dans ce deuxième tome du Monde de Belmilor, Eschylle, le chat magicien, nous entraîne encore plus loin dans l’aventure, tout en cultivant notre sagesse avec humour.

Roman fantastique par Pierre-François Kettler, publié en 2021 aux Editions d’Avallon. Tome 2 de la saga Le monde de Belmilor. Mon avis sur le tome 1, Apparences ici


Le monde de Belmilor est une saga que j’ai commencée il y a plusieurs années, à l’époque où elle s’appelait encore L’Eschylliade. J’avais lu le premier tome dans le cadre d’un service presse, je l’avais beaucoup apprécié mais n’ai jamais cherché à me procurer les tomes suivants : je n’ai pas du tout l’habitude de lire des sagas, chercher à me procurer la suite n’est pas naturel chez moi. Mon avis sur ce second tome ne diverge que très peu de ce que j’avais pensé du premier tome : un livre magique (c’est le cas de le dire !), vite lu, attachant sous bien des aspects. Je remercie l’auteur Pierre-François Kettler et les Editions d’Avallon de m’avoir fait confiance.

Le monde de Belmilor est une saga fantastique dans laquelle on suit Bélerin et toute sa clique de magiciens en tous genres. Mais on décentre le regard, puisque le récit ne se fait pas à hauteur de « deux-pattes » mais de « quatre-pattes » en ce que le narrateur est… un chat. Et pas n’importe quel chat ! Eschylle, « l’élu », le compère de Bélerin avec lequel il peut communiquer par télépathie. Un animal avec d’étranges pouvoirs qui se précisent au fur et à mesure du roman, et, j’imagine, plus tard, au fur et à mesure des tomes.

Or, mon maître était très froussard… et il m’avait transmis cette qualité. Qualité ou défaut ? Les deux, lecteur adoré ! Avoir peut et l’accepter permet de savoir quand il faut fuir !

D’abord, je dois avouer qu’il m’a été quelque peu difficile de me plonger dans le second tome si longtemps après avoir lu le premier. Quelques pages sont présentes en début d’ouvrage pour resituer l’action et le très grand nombre de personnages, ainsi que quelques notes faisant office de rappel qui, je l’avoue, n’ont pas été de trop. Ma première impression sur Originalité a donc été quelque peu brouillonne – j’étais perdue dans le foisonnement de personnages et le positionnement obscur de l’action. De plus, à un certain stade du récit, les personnages ne font que se battre, et il est parfois un peu difficile de comprendre qui est leur ennemi, pourquoi est-ce qu’ils se battent et en quoi celui-ci est différent de l’ennemi croisé vingt pages avant. De manière générale je ne suis pas fan des combats dans les livres et ceux-ci en rajoutaient à l’impression globale un peu confuse qui émane à première vue du livre.

Mais les personnages en question, bien que nombreux, étaient aussi follement attachants. Pour nuancer ce propos : on voit les compagnons d’Eschylle à travers ses yeux, c’est-à-dire tour à tour détestables et sympathiques. L’immersion dans le psyché du narrateur est à mon sens très bien réussie, aussi original soit-il ! Les sentiments, amour comme répugnance, du chat deviennent ceux du lecteur au fur et à mesure des pages : on s’approprie son aventure, ce qui représente, pour moi, le summum de toute entreprise romanesque. L’écriture de Pierre-François Kettler est fluide et agréable, dotée d’un humour qui fait vraiment rire à voix haute au fur et à mesure de la lecture. C’est assez rare qu’un livre me fasse rire pour que ce soit souligné !

L’originalité du choix du narrateur constitue pour moi l’atout majeur du livre. Dans quelques années, quand les intrigues se seront brouillées dans mon esprit, je me rappellerai tout de même : « mais oui, c’est ce livre qui nous met à hauteur de chat ». De plus, les interactions directes avec le lecteur sont très présente, puisque Eschylle enseigne un cours de Morale de la Magie et apostrophe souvent ses étudiants. Après avoir été chats, nous voici mages en devenir… C’est une force puisque cela nous pousse à rester impliqués dans la lecture.

Mais l’Originalité, c’est aussi le titre du roman, et ce n’est pas anodin, puisque l’intrigue est menée de manière didactique, comme un cautionary tale : gardez votre originalité, ou voici ce qui arrivera… Ce sous-texte donne une nuance supplémentaire à la lecture d’un livre au premier abord léger, presque enfantin. En revanche, j’ai trouvé que cette leçon était moins présente que « ne te fies pas aux apparences » dans le premier opus. La troisième leçon est sur l’amour, et j’ai hâte de la découvrir.

Pour conclure, je recommande ce livre :

  • Aux adultes et aux enfants qui ont envie de savourer une aventure fantastique comme un bonbon
  • Aux amateurs de nos félins compagnons
  • Aux fan de fantasy qui ont envie de découvrir quelque chose de différent

Comédien, metteur en scène, auteur dramatique, passionné de Victor Hugo, de Robert Desnos, de poésie et de jeu, Pierre-François Kettler met depuis toujours ses écrits au service de l’humain, dénonçant notamment le Code Noir ou le génocide contre les Tutsi au Rwanda. Les voyages l’ont ouvert sur le monde ; le théâtre l’a réconcilié avec son corps et son esprit. Depuis 2015, il harmonise sa chair et ses rêves en les écrivant. Depuis 7 ans, il anime le site « Entendre Victor Hugo ». Mais il ne faut pas se fier aux apparences : en réalité… Pierre-François Kettler est un chat !

Stephen King – La Ligne verte

Paul Edgecombe, ancien gardien-chef d’un pénitencier dans les années 30, entreprend d’écrire ses mémoires. Il revient sur l’affaire John Caffey – ce grand Noir au regard absent, condamné à mort pour le viol et le meurtre de deux fillettes – qui défraya la chronique en 1932.
La ligne verte est le reflet d’un univers étouffant et brutal, où la défiance est la règle. Personne ne sort indemne de ce bâtiment coupé du monde, où cohabitent une étrange souris apprivoisée par un Cajun pyromane, le sadique Percy Wetmore avec sa matraque et Caffey, prisonnier sans problème. Assez rapidement convaincu de l’innocence de cet homme doté de pouvoirs surnaturels, Paul fera tout pour le sauver de la chaise électrique.

Roman fantastique de Stephen King publié en 1996. Titre original : The green mile. Traduit par Philippe Rouard.


Le pianiste parti, il n’y a pas un seul piano au monde qui se souvienne du récital donné.

J’aime beaucoup Stephen King, car il a cette faculté de créer des mondes toujours plus vivaces à travers ses mots – j’ai lu ses romans les plus connus, notamment Shining et Ca. Il excelle dans l’horreur et dans sa capacité à faire grimper le suspense doucement, vertèbre par vertèbre, nous faisant frissonner de plus belle. Pour autant, La Ligne verte est un outsider : pas d’horreur, du fantastique, du politique, du réel, un récit à couper le souffle du début à la fin.

C’est l’histoire de Paul Edgecombe, gardien de prison au fameux bloc E, celui des condamnés à mort. Le lecteur se glisse dans son uniforme de flic et vit cette drôle de vie à travers ses yeux : il rencontre les prisonniers, Delacroix, Wild Bill et un certain John Caffey, comme le café mais pas écrit pareil, les autres gardiens, Percy Wetmore, Harry, Dean, Brutus, et l’administration bien huilée de la protagoniste du récit, la dénommée miss cent mille volts ou veuve courant, la chaise électrique. Electrique comme la tension qui se construit peu à peu durant ces cinq cent pages que l’on voit à peine passer tant elles sont intenses, pleines. L’écriture de Stephen King coule comme de l’eau entre nos doigts, nous poussant à en demander toujours plus. L’histoire est terriblement humaine : Paul Edgecombe est attachant, c’est quelqu’un de bien, qui fait des choix risqués mais justes. Il est pour moi la force de ce roman, un personnage en relief avec des forces et des faiblesses, qui pourrait être cliché mais qui ne l’est pas, un personnage avec ses paradoxes et ses contradictions, terriblement attachant.

Le sujet en lui-même – la peine de mort – pourrait être traité de manière clichée. Mais l’auteur a réussi à y échapper, montre l’horreur de la « veuve courant » sans pour autant juger les gardiens du bloc E qui ont tout simplement le sentiment de faire leur travail. Je ne considère pas ce livre comme engagé, bien que je sais qu’il peut être considéré comme tel. En tous cas, peu de jugement de valeur est attaché explicitement au concept de peine de mort, ce qui rend très timide ce possible côté engagé. Oui, il y a une consonnance politique, mais qui est loin d’être l’essentiel du propos. La moralité des gardiens, qui sont au centre du roman, n’est que très peu explorée. Je dirais plutôt que différentes thématiques se mêlent à celle de la peine de mort, comme notamment le racisme – John Caffey est noir, et une rapide réflexion en fin de livre pointe les travers racistes de la société, mais là encore ce n’est pas au devant de la scène.

La Ligne verte est en réalité un livre sur la prison en général : les individus qu’on y trouve des deux côtés des barreaux, les dysfonctionnements, et cette ligne verte qui mène vers la mort. C’est un livre sur la sensibilité, sur l’empathie, sur le courage d’essayer de faire le bien. On reconnaît la finesse de Stephen King qui s’illustre particulièrement hors du domaine dans lequel on le connaît habituellement. Bien que les 500 pages de ce livre paraissent quelquefois un peu longues, que certains passages ne sont clairement pas nécessaires pour le récit, il se lit en une bouchée. J’ai particulièrement aimé la manière dont sont construits les personnages qui débordent (presque) tous d’humanité. Paul Edgecombe n’est pas le seul personnage creusé du livre, bien qu’il s’agisse de celui auquel le lecteur s’attache le plus, étant le narrateur.

Je conseille ce livre :

  • Aux âmes sensibles qui veulent découvrir Stephen King sans avoir peur
  • Aux personnes intéressées par le milieu carcéral
  • A celleux qui aiment les livres palpitants !

Stephen King est né le 21 septembre 1947 dans le Maine. Il a écrit une cinquantaine de romans depuis son premier, Carrie, paru en 1974, et quatre fois plus de nouvelles. Il est connu pour être un maître du suspense et de l’horreur.

Bilan 2023 & Objectifs 2024

Bonjour à toustes ! Je sais que j’ai été assez peu présente sur le blog ces derniers temps, mais j’ai tout plein de projets pour 2024 et j’ai hâte de m’y lancer ! Parmi mes « bonnes résolutions » (je sais qu’elles sont faites pour ne pas être tenues ahah, mais sait-on jamais :)), il y a celle de poster un article sur le blog toutes les deux semaines ! Pour ce tout premier article de l’année, je voulais vous partager mon bilan livresque 2023 et mes objectifs 2024.

Mon bilan 2023

J’ai pas mal lu cette année étant donné que j’avais beaucoup de temps. Le chiffre exact : 52 livres, ce qui est mon record annuel depuis… 2016 ! De manière assez rigolote, 52 livres ont également rejoint ma PAL, ce qui fait qu’elle stagne à un total de 66 livres.

En termes de genres, j’ai essentiellement lu des livres contemporains, parce que c’est ce que j’aime, ce qui me rend heureuse et me fait plaisir à lire. Parmi eux, il y a quelques coups de coeur que je me dois de vous exhorter à mettre dans votre PAL 2024, si ce n’est pas encore le cas.

  • Emmanuel Carrère, D’autres vies que la mienne – j’avais fait un article pour chanter ses louanges. Vous n’imaginez même pas à quel point j’ai monumentalement adoré ce roman. Touchée en plein coeur. Un peu plus tard dans l’année, j’ai lu L’Adversaire, un des romans les plus connus de l’auteur, mais il m’a moins marquée.
  • Emma Becker, La Maisonl’article en question. La vraie vie des prostituée berlinoise, avec une écriture ronde et pleine. Un livre passionnant à lire et relire.
  • Yannick Haenel, Tiens ferme ta couronne. J’ai voulu écrire un article sur celui-ci, et puis je n’ai pas réussi. Un océan d’étrangeté, un livre-fleuve qui soulève tout un tas de questions, qui fait hausser les sourcils. Il faut ne pas être accroché.e à sa raison, ne pas trop être sourcilleux.se pour pouvoir s’y plonger pleinement. Je recommande ce livre aux lecteurices aguerri.e.s qui veulent se sortir se leurs lectures habituelles et qui n’ont comme moi pas l’habitude des romans loufoques. C’est est un grand.

Je tiens tout de même à accorder une mention honorable à Emily Henry et son Book Lovers (mon avis complet), qui m’a fait (re)découvrir le genre du romcom. Je pense que ça a été l’un des livres les plus addictifs et les plus feel good lus cette année. J’en ai lu un autre d’elle, un peu moins mémorable hélas. Je pense me noter son nom dans la tête pour ce printemps.

J’ai aussi lu divers essais cette année, comparativement plus que les autres années. En particulier j’ai lu le fameux Deuxième Sexe de Beauvoir, qui n’était pas facile du tout. J’aimerais le relire plus tard, armée d’un surligneur et d’un carnet de note pour pouvoir pleinement l’appréhender. J’ai aussi lu quelques essais sur l’écologie comme L’écologie n’est pas un consensus de François Gemenne ou 800 jours au ministère de l’impossible de Léo Cohen. Coup de coeur du genre notamment sur Sois jeune et tais-toi de la journaliste Salomé Saqué, un ouvrage sur la jeunesse et la manière dont elle est perçue dont la lecture ferait, je pense, du bien à beaucoup de gens… jeunes et vieux !

Objectifs 2024

Je n’aime pas trop me fixer un nombre de livres à lire. En 2023, j’ai eu beaucoup de temps pour lire mais je projette d’entrer en prépa concours en 2024, ce qui implique que je vais sûrement avoir beaucoup moins de temps pour lire. Je ne veux pas donc m’imposer de chiffre, et je ferai au fil de l’eau. Je suis contente cependant d’avoir de nouveau implémenté la lecture dans mes routines et de prendre réellement le temps de lire un peu tout les jours. En 2024, j’aimerais quand même faire rétrécir ma PAL, c’est-à-dire lire plus de livre qu’en acheter. C’est un objectif pas si simple car ça va très vite de craquer en librairie et que mes proches aiment bien m’offrir des livres ou de quoi m’en acheter à Noël ou mon anniversaire.

En termes de genre, le mot d’ordre pour 2024 est : ouvrir l’horizon ! Je suis beaucoup resté sur mes acquis en 2023 en lisant notamment de la littérature contemporaine. J’aimerais notamment investir d’un peu plus près le domaine de la fantasy. Cela va arriver très vite puisque je vais bientôt lire L’Empire ultime de Brandon Sanderson. Sinon, j’aimerais aussi approfondir mes connaissances de certains auteurs découverts cette année, notamment Emmanuel Carrère dont je vous ai déjà parlé ou Annie Ernaux.

Mais mon objectif principal est de me faire plaisir dans ma lecture, de continuer à suivre mon instinct et à lire ce qui me fait plaisir. Je ne me fais pas de programme, je ne me mets pas de pression, je veux continuer à ce que cette activité soit pour moi une source de plaisir. Et surtout, je suis motivée à continuer à vous partager mes aventures livresques. Je vise un rythme d’un article toutes les deux semaines !

Je vous souhaite une très belle année à toustes, qu’elle soit belle et plein de nouvelles lectures ! N’oubliez pas de vous inscrire à la newsletter pour être au courant de tous mes nouveaux articles 🙂

Mon bilan d’août 2023

Bonjour tout le monde, j’espère que vous allez bien en ces (trop) chaudes journées de septembre. Mon mois d’août a été très chargé, très occupé et j’ai beaucoup lu au cours de mes pérégrinations. C’est sûrement le dernier mois au cours duquel je lis autant puisqu’après trois mois en Italie et un mois de vacances, je retourne désormais à la vraie vie, vous savez, celle qui ne laisse pas le temps de dévorer autant de livres qu’on aimerait…

Mes bilans précédents : juilletjuin –  mai – avril

L’ambiance livresque de ce très chaud mois d’août

Ce mois a été placé sous le signe de la rentrée. Je devais lire des livres à la pelle pour préparer le mois de septembre : j’ai notamment lu des romans conseillés pour un atelier d’écriture que je fais avec Karine Tuil sur le thème de la littérature du réel. Mes vacances m’ont laissé le temps de lire beaucoup plus que d’ordinaire, j’avoue que je suis très fière de moi. Ce mois-ci non plus, aucun coup de cœur à annoncer, mais aucune sincère déception non plus ; que des belles découvertes ! Au niveau des genres j’étais (comme à mon habitude) très ancrée dans la littérature contemporaine avec une pointe de classique et d’essais. Je pense que ce mois de lecture est très représentatif de mon style habituel.

(Je suis encore en retard sur mes articles. Je vous mets un petit ♦ devant les articles qui feront très probablement l’objet d’un article !)

Mes lectures d’août

  • Marguerite Duras : Un barrage contre le Pacifique. J’ai bien aimé ce bouquin au même titre que L’amant de la même autrice. Quelques longueurs mais le style incisif de Duras sauve toujours la mise. – lire mon article
  • Emmanuel Carrère : L’adversaire. J’ai beaucoup aimé la manière dont l’auteur a abordé l’histoire de monsieur Romand. Un peu dur à lire parfois, il fait preuve d’une très étonnante sensibilité que j’ai déjà trouvé chez Carrère. Il est addictif et donne envie d’en lire plus !
  • Karine Tuil : Les choses humaines. Encore une fois, Karine Tuil ne m’a pas déçue. Je me suis sentie comme à la lecture de La décision : l’impression d’être au-dessus d’un abyme et de ne pas pouvoir empêcher les gens d’y trébucher. Un peu étonnée de l’opinion que semble laisser transparaître l’autrice cependant.
  • Simone de Beauvoir : Le deuximème sexe, tome 2 – L’expérience vécue. Bon. Il va falloir que je le relise quand mon sens philosophique sera un peu plus aiguisé. C’était une lecture très intéressante qui dépeint des faits, même si (heureusement) l’époque dont parle Beauvoir est assez éloignée de la nôtre.
  • Molière : L’avare. Une petite lecture bien sympathique qui m’a transportée de nouveau sur les bancs du lycée.
  • Caroline Michel-Agire & Matthieu Aron : Les infiltrés. Comment les cabinets de conseils ont pris le contrôle de l’Etat. Très bon bouquin, mais il va avec la terreur qui va avec. On parle ici des prémisses de la véritables privatisation des services publics, et questionne l’organisation au plus haut sommet de l’Etat ainsi que son utilité. Chiffre remarquable : durant la crise sanitaire, plus d’argent public a été alloué aux cabinets de conseil (stratégie vaccinale, TousAntiCovid…) qu’à la recherche médicale.
  • ♦ Yannick Haenel : Tiens ferme ta couronne. J’ai adoré ce livre, contre toute attente. Les 50 premières pages sont un peu arides, certes, mais une fois le passage difficile passé, ce roman est passionnant. Original, étrange, surprenant, glauque parfois, loufoque toujours, j’en ai vu de toutes les couleurs !
  • Truman Capote : De sang-froid. De sang-froid (qui porte bien son nom) m’a fait une drôle d’impression. Encore une fois, j’ai pu voir une peinture de la noirceur de l’âme humaine, de ce que l’on peut faire de plus sordide. Truman Capote est un excellent écrivain et je me ferais un plaisir de lire un autre de ses livres.

J’ai donc lu un total de huit livres ce mois-ci, ce qui est vraiment beaucoup ! La plupart d’entre eux étaient très courts donc il n’y a rien de proprement extraordinaire dans ce beau bilan 🙂

Et je suis actuellement en train de lire Le soleil des Scorta de Laurent Gaudé, que je conseille vivement !

Le mois en quelques titres

Ma meilleure découverte

Le plus terrifiant

Le plus émouvant

Le livre que je veux absolument lire le mois prochain

Bilan de juillet 2023

Bonjour tout le monde ! Ca y est, la moitié des mois d’été se sont écoulés. Je suis en vacances depuis deux semaines, mais il me reste jusqu’au mois d’août pour découvrir encore plein de livres ! Mon activité à la rentrée sera incertaine comme je démarre un nouveau master dont j’ignore tout, mais j’ai très hâte de me lancer.

Bilans 2023 : juinmaiavril

Le thème livresque du mois de juillet

A vrai dire, j’avoue que ce mois-ci, je me suis complètement éparpillée ! Mes lectures n’ont aucun sens, plus dictée par l’accessibilité que par l’humeur ou l’envie. Le passage thématique violent entre La délicatesse du homard et Si c’est un homme illustre bien mon côté versatile en ce moment. Vous en entendrez souvent parler, mais je me suis lancée dans un challenge : acheter un livre seulement pour tous les deux livres lus (objectif : vider ma PAL de ses vieilleries). La règle est dure à respecter, et je suis actuellement dans le « négatif ». Je lis ainsi petit à petit d’anciens livres dont j’avais eu envie il y a longtemps, et qui ne sont plus trop dans mes envies actuelles. Je découvre de chouettes pépites mais aussi des déceptions, et je m’en veux de ne pas avoir lu ces dernières quand je les ai achetées, elles m’auraient sans doute plus plu !

A noter : je suis bien bien en retard dans tous les articles que je veux écrire. La plupart des romans que j’ai lus seront chroniqués d’un jour à l’autre, armez-vous de patience !

Mes lectures de juillet

  • Pierre Lemaître, Couleurs de l’incendie. Suite du prix Goncourt Au revoir là-haut, ce roman est le deuxième tome de la trilogie des Enfants du désastre. J’ai adoré ce roman historique, palpitant, traitant de sujets complètement méconnus, et bien écrit.
  • Laure Manel, La délicatesse du homard. Quelle déception ! Je veux bien que quelqu’un m’explique l’engouement pour ce roman que j’ai trouvé niais, lent et inutile. (Je l’avais reçu dans une box Kube il y a peut-être deux ans mais bof, même si la recommandation est supposément personnalisée ce conseil-là n’a pas été clairvoyant !)
  • Primo Levi, Si c’est un homme. Un roman historique important, poignant, mais à la fois à la limite entre le documentaire et le témoignage. L’auteur ne s’implique pas, voire très peu, dans les horreurs qu’il a vécues, ce qui surprend et donne une nette impression de dissociation. A lire et faire lire, pour l’importance du souvenir.
  • Taylor Jenkins Reid, The seven husbands of Evelyn Hugo. Cette incartade dans la vie d’une actrice hollywoodienne dépoussière beaucoup de sujets peu traités dans la littérature. J’ai franchement adoré ce roman, mais il m’a manqué l’étincelle du coup de coeur.
  • Marc Levy, Eteignez tout et la vie s’allume. Celui-ci, par contre, je peux dire que je l’ai tout bonnement détesté ! 200 pages de vacuité, des personnages hallucinants, des dialogues qui dissonent… Encore un gros no pour l’auteur à succès.

Et je suis actuellement plongée dans deux lectures en parallèle : Le deuxième sexe de Simone de Beauvoir et Un barrage contre le Pacifique de Marguerite Duras. Je devrais les finir assez rapidement !

Le mois de juillet en quelques titres

Le plus feuilletonesque et attachant

Le plus important

Le plus nul

Le livre que j’ai envie de lire le mois prochain

Et vous, qu’avez-vous lu en ce joli mois de juillet ?

Mon bilan de juin 2023

Bonjour tout le monde ! J’espère que vous vous portez bien en ces jours ensoleillés. Je sais que je poste à un rythme un peu réduit ces derniers temps, mais croyez-moi, la lecture avance ! La preuve avec ce bilan de juin 2023 qui est encore plutôt honorable 🙂 Je suis avide de vos retours et de savoir ce que vous avez lu ce mois-ci !

Lire aussi : mon bilan de maimon bilan d’avril

Ce que mes lectures du mois m’ont inspiré

Grâce à mes gentils parents qui ont amené des livres de chez moi, je n’avais plus le problème d’épuisement des stocks du mois dernier. J’ai donc pu lire de nouveaux livres, des cadeaux, des vieilleries que je prends enfin le temps d’ouvrir et qui s’avèrent être de bonnes surprises. Et ce mois-ci, mesdames et messieurs, je vous l’annonce : c’est l’été ! Au programme, du roman romantique, de l’amour, du voyage, dans tous les sens du terme. Je suis plutôt contente de mes lectures du mois de juin, durant lequel je n’ai pas eu de mauvaise lecture, ou de lecture inintéressante. J’avais une bonne impulsion et je suis contente de cela !

Les livres que j’ai terminés en juin

  • Emily Henry, Book lovers (Penguin, 2022). Je vous en ai déjà parlé dans un article, mais le mois avait déjà miraculeusement bien commencé avec ce roman très joli et sans prise de tête, une romance assumée qui m’a donné envie de me remettre à en lire plus !
  • Salomé Saqué, Sois-jeune et tais-toi (Payot, 2023). Cet essai sur les incompréhensions intergénérationnelles me faisait vraiment vraiment de l’oeil depuis un moment. Je suis enfin heureuse de l’avoir lu, surtout qu’il était largement à la hauteur de mes attentes ! Je prévois de vous écrire un petit article dessus, sur le modèle de mon article sur L’écologie n’est pas un consensus. Patience, il devrait arriver rapidement !
  • Emily Henry, Comme dans un roman d’été (Penguin, 2020). Comme j’avais adoré Book lovers, mon amoureux m’a offert cet opus-là, paru dans sa version originale sous le tite Beach Read. J’y ai retrouvé les mêmes ingrédients qui font que j’ai adoré Book Lovers, mais en un poil moins bien. Franchement, Emily Henry est la reine des romans estivaux !
  • Toshikazu Kawaguchi, Tant que le café est encore chaud (Albin Michel, 2021). J’ai lu ce livre pour un book club. J’aime bien la littérature japonaise en principe, et celui-ci n’a pas fait exception. C’est un livre des plus agréables à lire, d’une douceur incroyable. L’écriture est simple, l’histoire est directe et porte quelques leçons intéressantes. Je vous ferai très certainement un article dessus dans le mois aussi.
  • Mélissa Da Costa, Tout le bleu du ciel (Le livre de poche, 2020). J’ai bien aimé, à l’image de tout le monde. L’écriture était fluide et l’histoire mignonne. J’ai beaucoup aimé les petites morales universelles qui sont disséminées dans le roman mais…. voilà, c’était trop long. Je lai lu rapidement mais franchement avec un peu de recul je pense que la taille du livre aurait pu être divisée par deux et avoir plus d’impact, sans perdre de sa substance. Du positif, donc, mais une impression de langueur qui ne m’a pas quittée au cours de ma lecture. Je prévois un article afin de détailler ce que j’ai pensé vraiment de ce livre.

Comme je poste cet article un peu tard dans le mois, j’ai déjà fini ma première lecture du mois de juillet (Couleurs de l’incendie de Pierre Lemaître) et je m’apprête à terminer la deuxième : La délicatesse du homard de Laure Manel, que je trouve franchement mauvais. J’ai hâte de voir si le dénouement me fait changer d’avis…

Le mois de juin en quelques titres

Le livre qui m’a le plus plu (on est même sur un coup de coeur !)

Le livre le plus surcôté

Le livre qui m’a le plus appris (et que j’ai ENFIN lu, après vous en avoir parlé pendant deux mois)

Le roman que j’ai le plus envie de (re)lire ce mois-ci… Celleux qui ont lu Tout le bleu du ciel comprendront pourquoi. Je l’ai déjà lu il y a des années mais je veux le relire ! (mon article dessus)

Et vous, que lisez-vous en ce moment ? Quel a été votre bilan du mois de juin ?

Karine Tuil : La Décision

Mai 2016. La juge Alma Revel doit se prononcer sur le sort d’un jeune homme suspecté d’avoir rejoint l’État islamique en Syrie. À ce dilemme professionnel s’en ajoute un autre, plus intime : mariée, Alma entretient une liaison avec l’avocat qui représente le mis en examen. Entre raison et déraison, ses choix risquent de bouleverser sa vie et celle du pays…

Livre contemporain de Karine Tuil. Publié chez Gallimard (Blanche) en 2022. 304 pages.

La réalité, c’est qu’on s’habitue à la possibilité de notre propre mort mais à la haine, jamais.

La Décision est un roman que l’on m’a beaucoup vanté. D’abord, parce que son thème le place irrémédiablement dans l’air du temps. Ensuite, parce qu’il est touchant, bouleversant, et que les personnages sont vrais et entiers. Mais ce qui m’a attirée dans ce roman, c’est sa dimension juridique. Je mourais d’envie de savoir comment les juges d’instruction du parquet anti-terroriste travaillent. C’est donc avec cet appétit, que dis-je ? Avec cette voracité que je me suis lancée dans ce livre, qui m’a beaucoup appris et que j’ai lu presque d’une traite.

Et j’ai été servie, c’est le cas de le dire. Dans La Décision, on suit Alma Revel, une juge d’instruction. Son travail consiste à diriger les enquêtes, mener les interrogatoires contre des personnes qui sont soupçonnées d’être sur le point de ou d’avoir commis des attentats terroristes. Le roman est particulièrement focalisé sur les personnes qui rentrent de Syrie et que l’on soupçonne de s’être radicalisés religieusement. Alma doit donc juger une affaire – c’est-à-dire que c’est elle qui décide si le prévenu, un homme qui rentre de Syrie avec sa femme et son tout jeune enfant, est susceptible de préméditer un attentat ou s’il peut retrouver sa liberté. Mais dans le même temps, elle entretient une relation amoureuse passionnelle avec l’avocat de ce même prévenu, ce qui est contraire à toute éthique au sein du tribunal. Ce cadre spatial est extrêmement précis et particulier et l’autrice, juriste de formation, le connaît bien, et ça se ressent intensément.

Ne prenez pas peur, je ne sous-entends pas qu’il y ait du vocabulaire particulièrement ardu ou que ce livre soit trop abrupt. En fait, chaque situation juridique est brièvement expliquée, et le fil du roman fait qu’on s’y retrouve et qu’on comprend grossièrement les fils qui font fonctionner le tribunal. Pour ma part cela a été une formidable occasion d’apprendre et découvrir, d’autant plus que le quotidien d’Alma est très bien détaillé, ses interlocuteurs principaux sont aussi des personnages et les relations de travail sont bien explicitées. Bref, c’est une plongée parfaite dans le milieu du tribunal. Mais Karine Tuil va plus loin et nous offre aussi une descente dans les profondeurs les plus sombres de l’âme humaine à travers une problématique qui apparaît extrêmement contemporaine : le terrorisme. Parce que les personnes avec qui Alma s’entretient au quotidien sont ou vont passer à l’acte. Alors l’autrice, à travers les yeux de sa narratrice, analyse plus ou moins finement les ressorts psychologiques de ces personnes. Cela donne à ce livre un réel intérêt, une plus-value qui n’est pas courante.

– Je me sens complètement perdue, tu comprends ? Je ne dors plus.

– Je vais te prescrire des somnifères et un léger anxiolytique.

Les désarrois contemporains ne se résolvaient plus que sur ordonnance.

Forcément, faire un métier comme celui d’Alma, ce n’est pas simple. Alors Karine Tuil n’y va pas de main morte, avec moults passages déchirants qui dépeignent la descentes aux enfers de la juge d’instruction au cours du livre. L’angoisse, l’anticipation, et plus que tout, l’attente. Cependant, je suis assez mitigée sur la manière dont c’est mené. D’une part, j’ai trouvé certaines envolées lyriques un peu répétitives, j’avais l’impression que la protagoniste n’évoluait pas, n’avançait pas, et c’était quelque peu frustrant. On saisit facilement le tourment d’Alma et on a juste l’impression de constamment tourner autour d’un pot, qui est toujours le même, sans s’en rapprocher. Mais d’un autre côté… Je suis passée par toute la palette de couleurs au cours de ma lecture. Celle-ci était si addictive et m’a si bien emportée dans le monde compliqué des affaires juridiques qu’à y penser aujourd’hui j’ai encore l’estomac retourné. D’un point de vue de la forme, donc, d’un point de vue rationnel, j’ai trouvé que la narration n’était pas spécialement bien menée. J’y reviendrai juste après. En revanche, d’un point de vue du fond, que ce soit pour faire passer un message ou pour exprimer des émotions et aussi tout simplement pour apprendre des choses, c’était en mon sens extrêmement réussi.

Je vais revenir rapidement sur la narration. Je suis un peu partagée sur ce que je dois en dire. On devine très facilement la fin, dès le début en fait, mais finalement, est-ce que Karine Tuil a vraiment voulu se concentrer sur l’histoire ? Est-ce que l’intrigue est vraiment l’importance de ce livre ? Surtout que l’histoire d’amour qui est un élément déclencheur reste extrêmement peu crédible et n’est certainement pas sur le devant de la scène. Ensuite, les personnages sont taillés au couteau assez grossièrement, parfois réduits à un ou deux traits de caractères souvent clichés. Je sais pour avoir lu quelques autres chroniques qu’il s’agit d’un point qui a beaucoup fait grincer des dents, surtout que le comportement d’Alma est agaçant, et au final… On ne s’attache pas vraiment aux personnages. Mais je ne sais pas si c’est l’écriture ou la baguette magique de l’autrice qui a fait que je n’ai finalement pas une opinion négative sur ce livre. Oui, à certains égards, il est moyen. Mais j’ai été si prise dans le tourbillon des événements, dans l’attente du point culminant, j’ai tremblé, pleuré et été angoissée, ce qui m’arrive rarement.

Il est rare qu’un livre me procure des sensations aussi contradictoires, à mi-chemin entre la subjugation et les dents qui crissent. Mais dans les faits, j’ai tout de même dévoré ce livre en quelques jours, à ne pas m’en décoller. Les chapitres relativement courts appellent au binge reading et l’histoire linéaire garde l’esprit accroché à elle. Je conseille ce roman aux curieux.ses du monde juridique, à celleux qui cherchent les racines de la haine car Karine Tuil en donne des clés, et à celleux qui ne diraient pas non à un livre addictif. J’espère que vous l’apprécierez autant que moi !

Karine Tuil est une romancière française. Son roman Les choses humaines lui a valu le prix Goncourt des lycéens en 2019.

Mon bilan de mai 2023

Bonjour tout le monde ! J’espère que vous allez bien ! Je crois que vous avez bien aimé mon premier bilan en avril (ici) alors j’ai trouvé que c’était une bonne idée de faire la même chose pour le moi de mai ! Vous êtes prêts ? N’hésitez pas à me parler de votre propre bilan en commentaire, je suis très intéressée par ce que vous lisez en ces jours ensoleillés !

L’ambiance livresque de mai

La plupart des lectures de mon mois de mai ont été dictées par un problème logistique (que j’ai déjà évoqué en avril mais qui est tristement devenu réalité ce mois-ci) : j’ai épuisé le stock de livres que j’ai emporté de la maison. Même mes ebooks qui traînaient au fond de ma liseuse depuis des années n’ont pas supporté la vague de temps libre que j’ai acquise depuis que je suis en stage. J’ai donc lu des choses qui auraient dû l’être il y a des années : cela a donc été l’occasion de quelques remontées dans le temps livresques auxquelles je ne m’attendais pas. Je suis aussi très contente de vider ma pile à lire.

Donc, ce mois-ci, j’ai (entre autres) fait les fonds de placards : de l’essai et du classique, s’il vous plaît ! Si bien que je n’ai pas de coup de cœur intersidéral ce mois-ci comme j’ai pu en avoir un le mois dernier avec D’autres vies que la mienne. Mais ce n’est pas grave car j’ai vraiment pu élargir mon champ de vision et découvrir de nouvelles choses.

Les livres que j’ai terminés en mai

  • Virginia Woolf, A room of one’s own & Three guineas. Vintage classics, 1929. Je pense que je suis un peu passée à côté à cause du fait que tout simplement le livre est en anglais et que je l’ai lu un peu vite. Il y a sûrement une nuance que je n’ai pas saisie et qui m’a empêchée d’adhérer aux propos de l’autrice.
  • John Steinbeck, Des souris et des hommes. Gallimard, 1937. Il s’agit d’un vieux livre qui traînait au fond de ma liseuse, et, franchement, je l’ai adoré. Tout en simplicité, tout en émotion. Je comprends pourquoi on le fait lire aux collégiens.
  • Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe (tome 1). Folio, 1949. Une lecture édifiante qui m’a fait comprendre pourquoi est-ce que cet essai est considéré comme une des bibles du féminisme. J’ai beaucoup appris, et surtout, j’ai envie de lire le second tome désormais !
  • Karine Tuil, La décision. Gallimard, 2022. Un article à ce sujet devrait sortir dans les jours à venir – j’ai tout bonnement adoré ce livre, mais plus sur le fond que sur la forme : j’ai trouvé la narration un peu moyenne, mais le sujet traité l’était absolument magistralement.
  • Leila Minano & Julia Pascual, La guerre invisible. Les Arènes, 2013. Un essai sur le sexisme dans les armées. C’est un essai extrêmement riche et complet qui brosse un portrait à la fois glaçant et terriblement juste de la situation de celles que l’on appelle les « féminines ». Je conseille hautement !
  • Alain-Fournier, Le grand Meaulnes. C’était un joli classique empreint de nostalgie. J’ai aimé ma lecture mais je n’ai pas vraiment réussi à m’immerger.
  • Inna Shevchenko, Héroïques. Les échappés, 2019. Un petit essai sur l’héroïsme dont les femmes sont capables. L’autrice est une activiste Femen, donc le bouquin vient avec les idées, avec lesquelles je ne suis pas entièrement d’accord. Mais j’ai beaucoup aimé le côté empouvoirant du bouquin.

Et je lis actuellement Book lovers d’Emily Henry, une comédie romantique qui me fait un bien fou. Après toutes ces lectrices assez peu amusantes, j’avoue que ma lecture retrouve un peu de souffle et de véritable plaisir. J’ai lu un tiers et je l’adore.

Quelques titres

Le livre que j’ai préféré ce mois-ci

Le livre qui m’a le plus appris

Le livre que je veux lire en juin (oui c’est le même que le mois dernier mais cette fois je le lis pour de vrai lol)

Et vous, quel est votre bilan de ce mois-ci ? Que prévoyez-vous pour le mois de juin ?

Avril